De instincts naturels de l’homme ou d’une déviation de ses instincts
À quoi attribue-t-on l’explosion démographique sans précédent à laquelle nous assistons impuissants ?
Aux progrès de la médecine. À la chute draconienne de la mortalité infantile. À l’augmentation de l’espérance de vie. À l’abondance alimentaire. À l’absence de prédateurs. À la plus grande sécurité, qui pousse les familles à procréer. À une envie de vivre et de donner la vie. À l’insuffisance des moyens contraceptifs. Peut-être au « Croissez et multipliez » de la Genèse…
Ces facteurs jouent certainement un rôle. On ne pense pourtant jamais à quelque chose de tout bête : que le nombre des naissances dépend directement de la manière de vivre la sexualité.
Notre culture nous renvoie l’image mythique de quelque chose qui ne marche pas comme il le faudrait entre Adam et Ève, c’est-à-dire entre l’homme et la femme. Que peut donc représenter la fameuse pomme que le serpent leur faisait croquer et qui déclenchait tous les malheurs du monde ? À moins de simplement rejeter le mythe, il y a là un point qui mériterait d’être éclairci. D’autant plus qu’en notre époque, le Croissez et multipliez représente plus une menace pour la planète qu’une ordre divin.
Le fait même que nous ayons besoin de contraceptifs pour maintenir un équilibre familial acceptable pose question. La comparaison avec l’animal également : les chaleurs ou le rut désignent la période de fécondabilité de la femelle, et il n’y a aucun acte sexuel en-dehors de ces périodes. La sexualité de l’animal est entièrement tributaire de la reproduction de l’espèce. Seule exception : les bonobos, qui pratiquent une sexualité à tout va, mais maintiennent pourtant des colonies parfaitement ajustées à leur environnement. Régulation qui s’opère sans famines ni morts prématurées, et jusqu’à nouvel avis sans recours à des moyens contraceptifs…
L’être humain serait-il un sorte de bonobo qui aurait perdu sur les chemins de l’évolution la capacité de contrôler spontanément sa prolifération ? Ou cette capacité n’aurait-elle jamais existé chez l’homme ? Il y a des raisons de penser le contraire : certaines tribus d’Indiens d’Amérique étaient connues pour l’ajustement du nombre d’enfants à la capacité de chasse du chef de famille, là aussi sans recours au préservatif ni à la continence ou autre contrôle délibéré des naissances.
Quoi qu’il en soit, la question se pose : s’il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans la sexualité depuis Adam et Eve, de deux choses l’une. Ou bien l’être humain porte en lui le germe d’une prolifération non contrôlée, et la seule solution est alors une limitation volontaire des fécondations. Ou bien cette situation provient d’un désordre qui se serait installé dans notre façon de pratiquer la sexualité. Peut-être un effet des excitants présents dans notre alimentation sur l’urgence de nos besoins sexuels. Ou de la perte de la « bisexualité fondamentale », ou des pratiques « polymorphes », pour prendre les termes de Freud, qui donnerait au « coït normal » une prépondérance qu’il n’a effectivement pas chez nos cousins bonobos…
À méditer…